par Frédéric Lefebvre-Naré
La sonnerie "Aux Morts" a retenti, cette année encore, face au Monument aux Morts, dans le cimetière de Calais.
Le cortège qui y conduit suit un itinéraire différent chaque année. Cette fois, à quelque mois du grand pèlerinage à la Sainte Tunique, il a grimpé les marches de la Basilique Saint-Denys[1].
C'est là que sont gravés les noms des Argenteuillais "Morts pour la France". Le curé et recteur de la Basilique nous a accueillis en tenue à l'ancienne.
Il a lu le célèbre poème de Péguy, mort aux premiers jours de la guerre :
Heureux ceux qui sont morts pour la terre charnelle,
Mais pourvu que ce fût dans une juste guerre.
Heureux ceux qui sont morts pour quatre coins de terre.
Heureux ceux qui sont morts d'une mort solennelle. (…)- Heureux les grands vainqueurs. Paix aux hommes de guerre.
Qu'ils soient ensevelis dans un dernier silence.
Que Dieu mette avec eux dans la juste balance
Un peu de ce terreau d'ordure et de poussière.
Je lisais ces temps-ci les "Paroles de poilus" réunies par Jean-Pierre Guéno — je trouve que ces vers de Péguy, de 1913, évoquent plutôt les cavalcades du XIXème siècle ; mais il n'a pas oublié "l'ordure et la poussière", dans laquelle des millions d'hommes allaient, pendant plus de trois ans, craindre l'obus qui les réduirait en bouillie, eux et la terre autour.
Le curé a enchaîné avec une prière — peut-être une première pour cette cérémonie républicaine.
Le cortège est reparti vers le cimetière de Calais…
… où nous avons entendu les discours d'usage.
Celui prononcé au nom de l'Union Française des Anciens Combattants appelait à une intervention des Nations Unies face aux crises actuelles — je me joins à cet appel.
Le Maire d'Argenteuil a appelé à "faire vivre l'esprit de toutes les réconciliations". Qu'il soit entendu.
La sous-préfète, au nom du secrétaire d'État aux Anciens Combattants, a évoqué le centenaire à venir des batailles de la Somme et de Verdun : toutes les communes de France seront appelées à organiser une cérémonie le 29 mai.
D'avance, quelques suggestions :
- Mettre de côté les distinctions partisanes. Si des conseillers départementaux souhaitent déposer une gerbe (très bien), qu'elle soit commune aux conseillers des trois cantons argenteuillais.
- Faire entendre la voix, montrer le visage de ces Argenteuillais d'il y a un siècle, Antonin-Georges Belin et tant d'autres, qui ont vécu et affronté l'horreur de la Grande Guerre. Autant et plus que les discours officiels, ils peuvent parler aux générations d'aujourd'hui.
- Mobiliser les écoliers, les collègiens, surtout les lycéens — ils sont à l'âge des guerriers, comme le rappellent les départs de jeunes pour la Syrie. C'est à eux que les témoignages d'hier et anciens combattants de toutes les guerres, ont une mémoire à transmettre. Et nous serons aussi un peu plus nombreux que les cent vingt pèlerins de ce 11 novembre.
- Et de la musique vivante, et faire chanter ! C'est tellement mieux que d'écouter la sono diffuser la sonnerie aux morts ou la Marseillaise.
Notes
[1] Merci à Georges F. pour cette photo.
1 De Roland -
A Levallois la partie religieuse a été plus politique. Le parti des chrétiens démocrates a éprouvé le besoin de déposer une gerbe comme le PS et le PC. Ceci devant le conseiller départemental qui lui n'a rien déposé.
La même méthode a été employée par le FN a Argenteuil ...
Ces chrétiens ont préféré commémorer les morts que d'assister a la messe qui précédait le dépôt de gerbe.
L'an prochain verra-t-on un autre parti liée a une religion déposer une gerbe? Les Chrétiens ont la fâcheuse habitude de mélanger la gouvernance et le discernement religieux. Clémenceaux plus laïc que jamais aurais rugit comme le tigre qu'il était.
2 De Philippe -
Tant qu'à évoquer sa mémoire, ANTONIN-Georges Belin, serait mieux... Et pour la présence des jeunes, le GARAC ne s'est il pas déplacé ? Il serait bon de le souligner...
NdB = merci pour la correction ! je la fais dans le corps du billet.
3 De Bernard -
Quand j'étais gamin, mon grand père, ancien combattant 14-18, nous reveillait le matin, mes frères et moi en criant : "Debout les morts"
Ce n'est que bien plus tard, passionné d'histoire, que j'ai compris la symbolique de cette expression.