Pourquoi la vague d'embauches d'adjoints techniques à Argenteuil ? (Débat sur le tableau des effectifs)

par Frédéric Lefebvre-Naré — Intervention en Conseil Municipal — billet complété le 5 avril 2015 par une vidéo réalisée à l'issue du Conseil.

Vous nous présentez, Monsieur le Maire, Monsieur l'Adjoint au Maire, un nouveau Tableau des Effectifs de la Ville, que vous nous demandez d’approuver.

Concrètement, et par rapport à votre premier tableau de mai dernier, celui-ci supprime 205 emplois budgétaires et en crée 60 autres.

Parmi les suppressions, 103, soit la moitié, correspondent bel et bien à des réductions du nombre d’emplois pourvus depuis le tableau de mai 2014. Ça n’a donc rien d’une délibération purement technique.

Qu’est-ce qu’un emploi budgétaire ? Je le rappelle pour les conseillers aussi néophytes que moi : ce n’est pas de l’argent, c’est une autorisation donnée par ce Conseil à votre Municipalité, de recruter un certain nombre d’agents, titulaires ou non, dans chaque secteur et chaque grade. D’une part cette autorisation doit être préalable — tant que le Conseil n’a pas voté, vous n’avez pas le droit d’embaucher, sauf sur des postes temporaires ; d’autre part, c’est cette autorisation préalable qui permet de contrôler démocratiquement, dans ce Conseil public, la politique de la Municipalité, à travers ses choix de recrutement ou de non-renouvellements de contrats. C’est pourquoi les Chambres Régionales des Comptes ont régulièrement critiqué les Municipalités qui faisaient voter beaucoup plus d’emplois budgétaires, qu’elles n’embauchaient réellement : dans ce cas, il n’y a plus de « lisibilité budgétaire », pour reprendre le jargon de la Cour. Une CRC se scandalise ainsi d’un écart de 7% constaté à Clermont-Ferrand, sur un effectif de 2500 agents, similaire à celui d’Argenteuil; une autre, d’un écart de 15% à Gerardmer, peut-être plus excusable par la petite taille de la ville. La petite ville de Mougins, Alpes-Maritimes, dépassait les 20%, et reconnaît devant la CRC qu'elle peut ainsi "modifier l'organisation de ses services ou créer des fonctions nouvelles en ne consultant qu'a posteriori le comité technique paritaire, dont l'avis est requis par la loi…"

Ce que vous nous proposez, « dans un souci de cohérence et de transparence », je vous cite, c’est un tableau avec 18% de plus d’emplois budgétaires, qu’il n’y a de postes réellement pourvus. Ce n’est ni de la lisibilité budgétaire, ni de la cohérence, ni de la transparence.

Si encore c’était une amélioration par rapport à la situation antérieure ! Mais le premier tableau que vous avez fait voter, en mai 2014, présentait un écart de… 18% également. Aucun progrès. Celui que vous avez présenté en septembre, c’était pire, 27%, mais je doute qu’il y ait là de quoi se vanter.

Alors à quoi peut servir de présenter au Conseil un tableau aussi éloigné de la réalité, sinon à masquer sous le gros chiffre des suppressions, un chiffre plus faible mais significatif de créations.

En septembre, vous aviez créé 25 postes d’adjoints techniques de 2ème classe, tous déjà pourvus au cœur de l’été ; vous demandiez donc au Conseil de régulariser une vague d’embauches sur lequel il aurait dû être consulté au préalable. Est-ce que cela répondait à une urgence ponctuelle donc excusable, toujours au cœur de l’été ?

Votre nouveau tableau montre le contraire, puisque vous créez 5 nouveaux postes d’adjoints techniques de 2ème classe, dont 3 déjà pourvus. Il s’agit certainement de postes qui seront utiles ; mais sachant qu’il s’agit là du grade correspondant à la plus faible qualification, la question se pose : est-ce que, dans tous les services de la ville, les postes où l’on manque le plus de personnel, sont les emplois de faible qualification des services techniques ? Vous invoquez régulièrement des sureffectifs dans l’agglomération, qui va, selon vous, vous reverser ses personnels à partir du 1er janvier : la Ville ne pouvait-elle pas se permettre d’attendre le 1er janvier ?

Et le tout sans la moindre explication (que pourtant Xavier Péricat nous avait annoncée en commission) sur l’urgence particulière de ces embauches, qui représenteront, en coût complet, de l’ordre d’un million d’euros par an de dépenses nouvelles. Alors même que vous répétez régulièrement ne plus avoir les moyens de payer les contractuels, ce pourquoi vous devez, à votre grand regret, mettre fin à leurs contrats. C’est incompréhensible et choquant, pour les employés concernés, comme pour les contribuables argenteuillais.

Pour les autres postes, le total est de 60 créations, dont 46 cet été et 14 cet automne, il s’agit de 1 ou 2 personnes à chaque grade, et je n’entrerai pas dans des considérations individuelles.

Pour les impôts des Argenteuillais et la dette d’Argenteuil, cette politique de recrutement est inquiétante ; pour le service rendu aux Argenteuillais, ce qui est inquiétant, c’est évidemment la vague des suppressions d’emplois, par non-renouvellement de contrats. Elles ne correspondent pas forcément aux suppressions d’emplois budgétaires, mais elles figurent bien entendu aussi dans le tableau : l’effectif employé par la Ville a diminué de 131 agents en moins de quatre mois, depuis le précédent tableau du 26 mai 2014. Vous annoncez que cette réduction se poursuivra pour atteindre 400 départs, soit presque un agent sur 5 : c’est le risque d’une dégradation sévère du service rendu aux Argenteuillais, et en premier lieu dans les écoles maternelles et les centres de loisirs, puisque un tiers des suppressions déjà réalisées touchent les animateurs, et un cinquième les ASEM.

Nous avons déjà dit notre inquiétude de voir la Ville au final payer double (au lieu de faire des économies), si elle doit, pour rendre le même service, réaliser de nouvelles embauches ou payer des prestataires privés, tout en versant les allocations chômage des agents non renouvelés.

Dans le cas des ASEM, c’est tout simplement un constat d’incohérence. Vous annoncez votre volonté d’affecter une ASEM dans chaque classe, vous affichez 145 emplois budgétaires d’ASEM, dont 116 sont pourvus ; mais il y a sauf erreur de ma part 211 classes de maternelle à Argenteuil, soit presque 2 classes par ASEM.

Les décisions que ce tableau démontre pour certaines, et qu’il cache pour d’autres, pénalisent les Argenteuillais dès maintenant, et sont inquiétantes pour l’avenir. Nous voterons contre cette délibération.

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